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Moeurs et coutumes en Himalaya

Les populations de l'Himalaya vivent dans un environnement âpre soumis à des phénomènes naturels extrêmes sur lesquels elles n'ont aucun contrôle. L'organisation sociale des société himalayennes est extrêmenet hiérarchisée et rigide. La vie quotidienne y est rude et l'incertitude du lendemain se fait insistante. Il n'est donc pas surprenant que leurs croyances et leurs coutumes soient étroitement associées aux cycles de la nature. Leur ferveur religieuse est partout manifeste et le divin est omniprésent dans leur environnement. Les monuments religieux, les temples et les monastères témoignent de la vitalité de leurs croyances et de leurs coutumes ancestrales. Ces croyances et coutumes trouvent leur apothéose dans les grandes fêtes religieuses qui, s'accordant aux cycles de la nature, rythment la vie là-bas.

Mode d'organisation sociale

Les manières de vivre des peuples et ethnies de l'Himalaya traduisent la rigidité de leurs structures sociales. Les sociétés himalayennes sont en effet rigoureusement hiérarchisées. Leur organisation sociale épouse en règle générale soit le système des castes, soit le système des clans. Tandis que les castes constituent la base de la stucture sociale des sociétés hindouistes, l'organisation des populations et ethnies bouddhistes s'articule à partir d'une structure clanique. L'appartenance à la caste ou au clan impose un ensemble de règles et d'interdits qui ont pour effet de différencier les groupes et les individus et qui déterminent la nature des rapports qu'ils entretiennent les uns avec les autres.

Les castes

Le système de castes constitue l'assise de l'organisation sociale des sociétés hindouistes. Chaque caste occupe un rang dans la structure sociale. La hiérarchisation des castes s'effectue selon le principe de la pureté. Des castes sont pures et d'autres le sont moins. Une large partie de la population est désignée hors-caste. Ce sont les « intouchables » appelés harijan en Inde ou dalit au Népal. Ceux-ci sont considérés impurs par les gens de castes parce qu'ils exercent ou sont les descendants de personnes qui exerçaient des métiers jugés impurs (forgeron, tailleur, boucher, tanneur, balayeur...). Le principe de la pureté est tel que même une personne de caste supérieure est considérée impure lors de certains événements de la vie (mort d'un parent, accouchement, période de menstruation).

Ceux qui tuent et dépècent les animaux ainsi que ceux qui vendent de la viande appartiennent à la  caste impure des bouchers chez les hindouistes. Par ailleurs, les bouddhistes ne pouvant tuer des animaux, font alors appel à des « impurs » d'une ethnie ou d'une caste étrangère pour faire ce travail à leur place. Ci-dessus, un boucher hui musulman au marché Barkhor à Lhassa au Tibet.

L'appartenance à la caste est héréditaire. Des règles définissent les obligations des membres de chaque caste et établissent la nature des relations entre les castes, y compris un ensemble de restrictions complexes s'appliquant notamment à la nourriture et au mariage. Les membres des castes supérieures ne peuvent accepter la nourriture qui a été touchée par des gens de castes inférieures. Les castes sont endogames, c'est-à-dire que l'on doit choisir son conjoint à l'intérieur de sa caste. Le changement de caste est parfois possible par le mariage entre personnes de castes différentes mais ces mariages sont généralement mal vus socialement.

À la différence des classes sociales dans les sociétés occidentales, lesquelles définissent l'appartenance à une catégorie sociale dont les limites sont plutôt imprécises, la caste est facilement identifiable et chacun sait précisément à quelle caste et sous-caste il appartient. La caste n'est en principe aucunement reliée à la richesse ni au pouvoir. Dans les faits toutefois, les gens appartenant aux castes supérieuses vivent plus aisément que ceux des castes inférieures. Quant aux intouchables, ils sont à toutes fins pratiques traités comme des parias par les gens des castes supérieures.

Même si en Inde et au Népal, les castes ont été officiellement abolies, l'ancien système n'en continue pas moins de modeler les comportements et d'exercer une influence profonde sur les rapports entre les groupes sociaux car il est profondément enraciné dans la religion hindoue.

Les clans

L'organisation sociale des groupes tribaux et des ethnies tibéto-birmanes tels les Tamangs, les Limbus, les Gurungs, les Sherpas, les Lepchas et combien d'autres, le Népal à lui seul en compterait une cinquantaine, repose sur une subdivision de ces groupes en clans patrilinéaires exogames. On se marie à un membre d'un autre clan appartenant au même groupe tribal. La filiation est associée à la famille du père. Ainsi, l'autorité sur les enfants est exercée par le père. En l'absence de ce dernier, l'autorité revient à ses frères, notamment son frère aîné.

Sans adhérer au régime des castes hindouistes, les groupes tribaux et les ethnies tibéto-birmanes obéissent aussi à un ensemble complexe de règles, de normes et d'interdits définissant les rapports sociaux tant à l'intérieur du clan, qu'entre clans d'un même groupe. Les bouddhistes ne pouvant tuer des animaux, certains métiers leur sont interdits. Aussi, ils font appel à des gens de « caste » inférieure hors du clan pour dépecer les animaux morts.

On peut conclure que l'organisation des sociétés himalayennes en castes et en clans favorise le cloisonnement des structures sociales et engendre une discrimination systémique envers les personnes liées par leur naissance aux castes considérées impures et aux clans désignés de rang inférieur.

Pratique religieuse

L'hindouisme et le bouddhisme constituent les deux grandes religions de l'Himalaya, l'islam s'étant surtout répandu dans le Karakoram, à l'extrême ouest de la chaîne himalyenne. La forme himalayenne de chacune de ces deux grandes religions témoigne largement de leurs emprunts réciproques : le poids du karma, l'importance du détachement et du renoncement, le cycle des réincarnations et certaines croyances animistes. Sans doute faut-il voir là l'une des raisons expliquant la tolérance religieuse exemplaire que manifestent les unes envers les autres les populations de l'Himalaya. Cette tolérance est manifeste au Népal, notamment dans la vallée de Katmandou où les temples hindouistes côtoient les temples bouddhistes et où certains d'entre eux sont fréquentés par les adeptes des deux religions.

Cultures de l'Himalaya

Les populations himalayennes sont profondément religieuses. Partout, les gestes de dévotion imprègnent la vie quotidienne des habitants. Les villes et les campagnes fourmillent de temples, de sanctuaires, d'autels votifs et de statues de divinités.

Rituel religieux

Astrologue hindou

Les paysages bouddhistes sont parsemés de drapeaux à prières, de moulins à prières et de murs mani qui ont pour fonction de transmettre aux dieux les prières qui y sont inscrites. Quant aux chortens, ils protègent les villages et les cols des esprits malveillants. La ferveur religieuse constitue sans doute l'un des traits culturels les plus typiques des sociétés himalayennes.

Vie communautaire

Dans les hautes montagnes, peu de villages bénéficient de l'électricité. Les travaux aux champs et les tâches ménagères occupent toute la journée. La majorité de la population vit d'une agriculture de subsistance et du petit élevage, le paysan produisant le strict nécessaire pour nourrir sa famille et, avec un peu de chance, un petit excédent qu'il s'empressera de vendre au marché. On utilise la charrue tirée par des boeufs pour les labours, les équipements modernes étant plutôt rares. Si la propriété individuelle est l'assise de la structure économique, le sens de la communauté est très développé et le travail de la terre est souvent accompli collectivement. Les bâtiments agricoles pour le séchage du grain et l'entreposage du foin sont utilisés par l'ensemble de la communauté.

Goût de la fête

Malgré l'extrême rudesse de la vie en Himalaya, les populations ont développé un goût exceptionnel pour la fête. Leurs calendriers abondent de fêtes, dont la plupart ont une connotation religieuse. Même si les coutumes se distinguent d'un lieu à l'autre, les fêtes sont partout l'occasion de grandes réjouissances auxquelles participent toute la population : Losar célèbre le nouvel an tibétain ; Dasain, la plus grande fête au Népal, célèbre la victoire de la déesse Durga sur le démon-buffle ; l'Indra Jatra à Katmandou souligne la fin de la mousson ; Biskhet Jatra à Bhaktapur célèbre le nouvel an.

En pays bouddhiste, les villageois se regroupent autour des gompas (monastères) pour assister aux grandes danses masquées du Cham chez les Tibétains, du Tsechu chez les Bhoutanais ou du Mani Rimdu chez les Sherpas du Népal.

Danse masquée et musique

Cérémonie bouddhiste... danse masquée et musique

Au rythme des tambours et des cymbales, moines et lamas, transformés en danseurs personnifiant grands saints bouddhistes et démons, font revivre les mystères et légendes centenaires. Par des chorégraphies minutieuses et hautes en couleurs, ils relatent la lutte des premiers contre les seconds et célèbrent la victoire du bien sur le mal.

Pages complémentaires
Ferveur religieuse
Temples et monastères
Bouddhisme tibétain
Hindouisme himalayen
Polyandrie fraternelle

 

 

Caste et religion

Le système de castes caractérisant les sociétés du sud de l'Asie, est intimement lié à l'hindouisme. Il prend sa source dans les veda, les textes les plus sacrés de l'hindouisme.

Les populations indo-européennes qui ont migré vers le sous-continent indien ont développé au cours des siècles un système socio-religieux très structuré hiérarchisant la société en quatre castes (varna) : la caste des Brahmanes (prêtres), celle des Kshatryias (guerriers et gouvernants), celle des Vaishyas (commerçants et artisans) et enfin, celle des Shudras (agriculteurs et serviteurs). Au fil du temps, des sous-castes professionnelles (jati) regroupant les gens exerçant des métiers similaires se sont imbriquées dans la sructure initiale, formant ainsi un système fort complexe (Barry C. Bishop 1990, Jean Ratel 1991).

Caste et contrôle social

Malgré l'énorme pression qu'exerce le système de castes sur les individus, il est, semble-t-il, des circonstances où certaines personnes prennent des libertés dans l'exercice de leurs devoirs de castes, comme ont pu l'observer Cyprien Luragui et Mukti Gurung (1991) lors de leur périple de 4 000 kilomètres à travers l'Himalaya. Il semblerait plus facile de déroger aux prescriptions du système de castes lorsque les autres ne sont pas là pour observer votre comportement « déviant », surtout en présence d'Occidentaux qui jugent vos manières discriminatoires. Par delà les convictions religieuses, le contrôle social jouerait donc un rôle important dans le maintien « de facto » du système de castes.

« Ce qui est frappant quand on voyage avec un intouchable, écrivent-ils, c'est que même dans l'intimité, il continuera de jouer son rôle de paria social. À chaque halte dans un bhatti, Jhambore se tient soigneusement à l'écart, boit son thé dehors et va ensuite lui même laver son verre, de peur de contaminer par sa souillure intrinsèque, le client suivant. Nous avons beau l'encourager, il persiste dans son auto-apartheid. Hari lui (un Brahmane) a depuis longtemps laissé tomber tous ses principes et devoirs de castes, partageant tout avec nous et buvant à la même gourde. Il est loin de son terroir, notre Hari. Ici, il peut tout se permettre, il voyage incognito. »

Polyandrie fraternelle

La polyandrie fraternelle (plusieurs frères prenant une même épouse et vivant sous le même toit) est pratiquée depuis fort longtemps chez les populations de culture tibétaine. Pourquoi ces populations ont-elles adopté cette forme de mariage peu commune dans le monde ?

Vie quotidienne

LA NOURRITURE DE BASE
Le riz, l'orge, le sarrasin, la pomme de terre et une grande variété de légumes constituent la base de l'alimentation dans l'Himalaya. Le plat le plus usuel chez les populations tibétaines est la tsampa, un mélange de farine d'orge grillée et de thé au beurre de yack que l'on mange avec les doigts de la main droite, la gauche étant impure. Les Népalais sont friands de dal bhat, un plat de riz et de légumes mélangés à une soupe aux lentilles. Les mets assaisonnés de piments sont très populaires chez les Bhoutanais. La pomme de terre constitue l'aliment de base des Sherpas. Elle est souvent consommée sous forme de gurr, une galette épicée avec du fromage.

LA VIANDE
Les bouddhistes ne mangent pas beaucoup de viande car leur religion leur interdit de tuer les animaux. Ils s'empresseront toutefois de récupérer un animal mort pour faire boucherie. Les momos, une sorte de ravioli tibétain, consiste en un plat de pâtes fourrées à la viande cuites à la vapeur. Comme chez les bouddhistes, la viande n'est pas consommée fréquemment par les populations hindouistes. Pourtant, lors de la fête de Dasain, des milliers d'animaux sont sacrifiés pour honorer la déesse Durga assoiffée de sang. La viande est alors au menu de toutes les familles durant cette période de réjouissances.

LES BOISSONS
Le thé est la boisson par excellence de tout l'Himalaya. Les hindous le boivent mélangé à du lait et du sucre, plus rarement avec du jus de citron. Les bouddhistes préfèrent le thé salé au beurre de yack. Disponibles en brique compactée, les feuilles de thé sont bouillies dans l'eau. On y ajoute sel et beurre rance et on bat le mélange dans une baratte. Les Tibétains boivent du thé à tout moment du jour. Par temps froid, ils peuvent en boire jusqu'à une trentaine de tasses par jour dit-on. Le chang est la bière de l'Himalaya. Légèrement alcoolisée, elle est fabriquée à partir de céréales d'orge ou de millet. Le rakshi, aussi très populaire, est un alcool fabriqué à partir des mêmes ingrédients.

Les interdits

La nourriture chez les hindous fait l'objet de nombreux interdits. Chez les gens de castes supérieures, la cuisine est sacrée. Les gens de castes inférieures ne doivent jamais y pénétrer ni même toucher aux plats servant à préparer et à servir la nourriture. Par contre, il est de coutume chez les bouddhistes de se réunir autour du foyer pour manger, prendre le thé et fraterniser. Les invités sont conviés à y prendre place.

La puja

La puja est une cérémonie rituelle visant à vénérer une divinité représentée par une image, une statue ou un symbole. On appelle la divinité par le tintement d'une clochette et on lui rend hommage en lui offrant des fleurs, de la nourriture, de l'encens et de l'eau tout en récitant des mantras. Si la divinité est présente sous la forme d'une statue, on la oint d'huite ou de pâte de sental ou on l'orne avec une guirlande de fleurs.

Rituel quotidien

La puja

Dans la société hindoue, la puja est un acte essentiel à accomplir chaque jour. Elle se déroule le plus souvent au temple. Elle peut aussi être accomplie au foyer ou se limiter au bain rituel du matin accompagné de la récitation de quelques mantras.

Marche et portage

Vivre en Himalaya signifie marcher et porter. Les femmes et les enfants marchent pour aller chercher l'eau et le bois de chauffage. Il faut marcher pour aller aux champs ou au prochain village. Il faut aussi marcher pour aller au dispensaire ou au marché situés à quelques heures de marche, parfois même quelques jours, pour rejoindre un village important. Il faut porter ou faire porter à dos d'homme ou de yack, les provisions et marchandises diverses dont on a besoin. Il est fréquent d'y rencontrer des enfants portant un petit frère ou une petite soeur accroché à leur dos pendant que les parents travaillent aux champs. Les corvées quotidiennes ne favorisent guère la scolarisation des enfants et l'émancipation des femmes.

Himalaya

Le portage... une activité quotidienne


Crédits photo
La puja © Serge-André Lemaire
Le portage © Jimmy Lam
Ritruel bouddhiste © L. M. T. Blancahrd