Le système des castes
Les
Indo-Népalais, ceux que Marc Gaboriau (1995) désigne
par l'expression « gens de castes », vivent au
sein de communautés strictement hiérarchisées
en castes. Ce système a profondément marqué la
mentalité des Népalais. L'appartenance à la
caste constitue sans doute le point de repère identitaire le
plus significatif pour les Indo-Népalais.
Le système de castes
népalais, codifié officiellement au XIVe siècle,
exerce toujours, malgré son abolition par le Gouvernement en 1964, une influence majeure sur le comportement des gens et les rapports sociaux
au sein de la société népalaise.
Traditionnellement, la hiérarchisation des castes était fondée sur l'importance des métiers exercés. Comme en Inde, la caste est héréditaire : on naît
dans une caste. La caste est endogame : on se marie avec une
personne de sa caste. La caste dicte la conduite à adopter avec
ses semblables et, plus important encore, avec les gens des autres
castes.
Hiérarchie des castes et influence
La
caste des Bahun (Brahmanes) et celle des Chhetri (Kshatryas) sont les castes les plus élevées. Les Bahun (Brahmanes),
situés au sommet de la hiérarchie, n'exercent pas tous une fonction religieuse mais ils sont les seuls à pouvoir le faire. Les autres sont souvent enseignants, agriculteurs ou font carrière dans l'Administration. Les Chhetri occupent le deuxième rang dans la hiérarchie des castes. Ils sont très nombreux dans l'armée et l'Administration et sont très présents au sein des élites politiques. D'autres sont par ailleurs agriculteurs. Les Chhetri sont les descendants des Kha qui ont érigé un royaume puissant à l'ouest de la vallée de Katmandou avant l'unification du Népal en 1768. Ils sont restés politiquement très influents. Les membres des autres castes traditionnelles se distinguent assez peu de nos jours. Les Bahun et les Chhetri regroupent environ 30% de la population népalaise.
Brahmane à Pashupatinath
Pureté des castes et discrimination
Le système des castes est indissociable de la notion de pureté. Les castes les plus élevées sont considérées « pures », les plus basses sont considérées moins « pures ». Tout au bas de l'échelle se situent les hors-castes, appelés aussi « intouchables » ou dalit, les « impurs » qui n'appartiennent à aucune caste, les parias de la société. Il s'agit des gens qui ont pour métier
des tâches considérées impures et dégradantes.
Les bouchers, cordonniers, chaudronniers, balayeurs, éboueurs, tanneurs, tisserands, porteurs et autres
travailleurs exerçant des métiers similaires sont des
hors-castes. Ce sont en général des gens exploités par les gens de castes.
Cette notion de pureté a des répercussions
observables tant au plan de la pratique religieuse qu'en ce qui a trait
aux comportements de tous les jours. Les membres des hautes castes ne doivent rien partager avec les « intouchables », notamment l'eau et la nourriture. Les
membres dune caste « pure » ne peuvent
accepter de l'eau ni manger des aliments préparés par un « intouchable ». Même
les lieux où la nourriture est préparée doivent être
gardés purs. Les « intouchables » ne doivent
pas y pénétrer ni même toucher les récipients
qui contiendront la nourriture.
Dans les villes, la situation s'est quelque peu améliorée. Les gens de caste supérieure qui entrent en contact avec un dalit ne prennent plus nécessairement un bain pour se purifier. Plusieurs se contenteront de s'asperger d'eau rapidement. D'autres ne feront rien de particulier. Il n'en va pas ainsi toutefois dans de nombreuses campagnes reculées.
Le système clanique
Les ethnies tibéto-népalaises n'adhèrent pas au système
de castes hindouiste. Leur organisation sociale repose plutôt
sur une division de la société en clans.
La hiérarchisation des groupes sociaux et la notion de caste ne
sont pas pour autant totalement absentes de leur mode d'organisation
sociale. Ainsi, certaines ethnies sont considérées supérieures à d'autres
dans l'échelle sociale. Leur rang diffère souvent d'une
région à l'autre dépendant de leur importance
relative dans la région et de l'influence qu'elles y exercent.
De plus, la perception qu'elles ont de leur rang social ne correspond
pas toujours à la perception qu'en ont les populations indo-népalaises
ni les autres ethnies. Au sein d'une même ethnie, certains clans
sont considérés supérieurs à d'autres.
En outre, certains groupes semblent appliquer, notamment au regard
de certains devoirs religieux, la notion de « pureté » comme élément
de différenciation sociale. Puisqu'il leur est défendu
de tuer les animaux, les bouddhistes feront souvent appel à des yawa (boucher),
pour faire ce travail. Ces personnes sont, de facto, assimilées à une caste impure en raison du métier qu'elles exercent.
Hindouisation
Plusieurs
ethnies tibéto-birmanes se sont plus ou moins assimilées à la
culture dominante. Les Newars, premiers habitant de la vallée
de Katmandou, se sont largement hindouisés. Ce groupe obéit
cependant aux prescriptions de son propre système de castes.
Ailleurs
dans les moyennes montagnes, où les Indo-Népalais sont
nettement majoritaires, certains groupes, notamment les Magars et les
Rais, sont de plus en plus influencés par l'hindouisme et adoptent
graduellement les coutumes de la majorité. Ceci illustre bien
toute la complexité du monde des castes au Népal.
Situation de la femme
Le
Népal est une société patriarcale où,
d'une manière générale, les femmes sont subordonnées
aux hommes. La condition féminine varie d'un groupe à l'autre.
La situation des femmes tibéto-népalaises est jugée
meilleure que celle des femmes indo-népalaises, à l'exception
des femmes de hautes castes qui ont des servantes et qui, de ce
fait, travaillent moins dur. Le statut social de la femme népalaise
dépend la plupart du temps du statut de son époux
ou de ses parents.
À la ville, le
rôle des femmes est confiné aux tâches domestiques et à l'éducation
des enfants. À la campagne,
le soin des bêtes et les travaux aux champs s'ajoutent aux
corvées ménagères. À la
montagne, elles travaillent encore plus dur parce que tout est plus loin, plus haut. Lorsqu'elles travaillent à l'extérieur du foyer,
elles occupent des emplois inférieurs et moins bien rémunérés
que les hommes. Les femmes plus instruites bénéficient
d'un meilleur statut dans la société mais cela n'affecte
pas leur position et leur influence au sein de leur famille.
Pages complémentaires
Éducation et santé au Népal
Économie et développement du Népal
Démographie du Népal
Castes traditionnelles
Lors
de leur établissement au Népal, les populations indo-aryennes
y instaurèrent leurs institutions, notamment leur système
de castes. La société népalaise, tout comme la société indienne, était divisée en quatre grandes castes, elles-mêmes subdivisées en sous-castes professionnelles fondées sur le métier exercé. La caste des Bahun, la plus élevée, était réservée aux prêtes. La caste des Chhetri (Kshatryas), la seconde dans la hiérarchie, était la caste des militaires et des administrateurs. La caste des Vaisyas était celle des agriculteurs et des commerçants tandis que la caste des Sudras, la plus basse, regroupait les serviteurs et les gens exerçant les petits métiers. Sous les Sudras se situaient les hors-caste ou intouchables, les « impurs » n'appartenant à aucune caste.
Castes et groupes ethniques
Les Indo-Aryens ne sachant reconnaître les rapports sociaux en
dehors de ceux prescrits par l'appartenance à la caste,
les familles de statut élevé appartenant aux ethnies
autochtones se virent assignées à la caste Chhetri.
Les autres furent assimilées aux gens de castes inférieures,
créant ainsi un chevauchement entre castes et groupes ethniques.
Dès lors, en s'adaptant à la réalité multiethnique
du Népal, le système de castes népalais s'est
distingué de celui de l'Inde, en comportant un nombre moindre
de castes et une plus grande fluidité entre elles. Les mariages
intercastes par exemple sont tolérés par les castes
supérieures dans certaines situations. Toutefois, les règles
s'appliquant à l'alimentation, notamment au don de l'eau,
sont rigoureusement observées.
Anachronisme des castes
Initialement,
le système de castes reflétait l'organisation hiérarchique
des responsabilités sociales et du travail et, conséquemment,
la classification des professions, métiers et tâches
selon leurs rapports avec ce qui était considéré pur
et impur. Depuis l'abolition du système de castes, les nouveaux
métiers ne sont plus codifiés. Par
ailleurs, contrairement aux anciennes coutumes, les gens exercent
de moins en moins le métier de leurs parents. Aussi,
l'appartenance à une caste a de moins en moins de signification
par rapport à son sens originel. Le Brahmane (Bahun) n'est
pas nécessairement prêtre, il peut tout aussi bien être
cultivateur ou cadre dans l'administration publique. Mais ses devoirs
de castes et les interdits touchant sa caste demeurent les mêmes.
Ainsi,
malgré ses dysfonctions et surtout, son absence d'assise
légale, le système de castes n'en continue pas moins
d'avoir une influence prépondérante sur les comportements
et les rapports sociaux. Des transgressions, variant d'une communauté à l'autre,
sont toutefois davantage tolérées. En général,
les petits villages reculés sont plus soucieux du respect
de l'orthodoxie que les grandes villes comme Katmandou. Les mécanismes
de contrôle social auxquels sont soumis leurs habitants y
sont beaucoup plus efficaces.
Mariage intercaste
Afin de lutter contre la discrimination faite aux dalits, le Gouvernement a mis en place des mesures, y compris financières, pour favoriser les mariages intercastes. Cette mesure vise à lutter contre le cloisonnement des groupes sociaux basé sur le système de castes. Les dalits représenteraient environ 15 % de la population au Népal. Malgré certains progrès, les mariages intercaste sont encore trop souvent mal vus. Les personnes qui osent transgresser ce vieux « tabou » ont des débuts difficiles dans leur vie de couple car ils doivent faire face à la réprobation sociale de bon nombre de leurs concitoyens.
Inégalité et
pauvreté
La société népalaise est en conséquence très inégalitaire. Les hors-castes souffrent de discrimination systémique, même si illégale. La condition féminine y a fait peu de progrès et, d'une manière générale, les femmes restent subordonnées aux hommes. On estime que
le revenu annuel moyen d'une famille népalaise serait inférieur à 1 000 US$.
Une large part de la population vit sous le seuil de la pauvreté : près du tiers estiment les Nations Unies et les ONG présentes sur le territoire. Selon un rapport de l’Organisation mondiale de la santé daté de 2009, la moitié des Népalais n’ont pas de toilettes chez eux. Dans des districts ruraux à l’ouest du pays, comme Rukum et Jajarkot, on est encore très en dessous de la moyenne nationale. Seulement 23 % des habitants possèdent des toilettes et 46 % ont accès à l’eau potable chez eux. Il n'existe aucun système formel de sécurité sociale au Népal.
Malnutrition
Au plan de la malnutrition, le Népal présente l'un des taux les plus élevés au monde. Près de la moitié des jeunes enfants ont un poids insuffisant. Selon un rapport des Nations-Unies (IRIN) daté d'août 2009, la malnutrition ne sévit pas que dans les villages des collines et des montagnes, où l’insécurité alimentaire est notoire. Elle affecte de plus en plus les populations habitant les plaines fertiles de la région du Teraï, pourtant considérée comme le grenier du Népal.
Selon plusieurs ONG présentes au Népal, les femmes seraient particulièrement touchées. La discrimination envers les femmes, les belles-filles surtout, qui se situent au dernier échelon de la hiérarchie familiale dans de nombreuses communautés, joue un rôle important. Elles sont souvent les dernières à manger et doivent parfois se contenter des restes. Même lorsqu'elles sont enceintes. Leurs bébés en subissent évidemment les conséquences. La situation est plus critique l'été, alors que la nourriture se fait plus rare, qu'il fait très chaud dans le Teraï et que la conservation des aliments est plus difficile.