L'exploration de l'Everest
Les
sommets de l'Himalaya étant considérés sacrés
par les populations locales, aucune tentative d'escalade sur l'Everest
ne fut réalisée avant l'arrivée des Occidentaux
au début des années 1920. Chevauchant la frontière
séparant le Tibet et le Népal, deux pays alors interdits
aux étrangers, la plus haute montagne du monde n'en suscitait
pas moins la curiosité des alpinistes occidentaux,
particulièrement les Anglais, désireux d'atteindre
son sommet les premiers. En effet, dès 1907, Natha Singh,
employé à la British Indian Survey, s'était
rendu au Népal pour établir un premier relevé topographique
de la vallée conduisant au glacier du Khumbu, au pied de l'Everest.
Première exploration
En
1913, John Noel,
officier de l'armée britannique, cherche une voie d'approche à la
montagne par la face nord. Il doit se déguiser pour pouvoir
circuler au Tibet, alors interdit aux étrangers. Seule la
haute diplomatie et une intervention auprès du Dalaï-Lama
lui-même rendront possible la mise sur pied des premières
expéditions.
L'expédition de 1921
La
voie nord étant ouverte, la Royal Geographic Society et
le Alpine Club de Londres s'entendirent sur la nécessité d'élaborer
un plan avant de lancer une expédition visant à conquérir
la montagne. Le Mount Everest Commitee, dirigé par
Francis Younghusband, fut mandaté à cette fin.
Une
expédition britannique de reconnaissance fut mise sur pied
en 1921. Dirigée par le lieutenant-colonel Charles
Howard-Bury, l'équipe
britannique établit son camp au col de Lhakpa à 6 860
mètres et explore les voies d'approche sur le côté tibétain
de la montagne. Le 24 septembre, George Leigh Mallory et Guy Bullock
se rendent à 6 990 mètres, où ils peuvent
distinguer l'arête nord qui monte vers le sommet. Une voie
d'accès au sommet de l'Everest vient d'être trouvée.
L'expédition de 1922
L'expédition de 1922Dirigée
par le brigadier-général Charles
Granville Bruce, la seconde expédition
britannique se met en route au printemps de 1922. Elle comprend George
Finch, Geoffroy Bruce, Henry Morshead, Edward Felix Norton, Howard
Sommervell, George Leigh Mallory et John Noel. Le 22 mai, Mallory,
Norton, Sommervell et Morshead atteignent 8 320 mètres.
Le 7 juin, lors d'une nouvelle tentative, sept Sherpas périssent
dans une avalanche sous le col nord. Premières victimes de
l'Everest. L'équipe est contrainte de se replier.
L'expédition de 1924
La
troisième expédition est aussi britannique. Dirigée
par le lieutenant-colonel Edward
Felix Norton, elle est composée
de vétérans des premières expéditions
et des nouveaux venus Noel E. Odell et Andrew Irvine. Il fait froid
sur la montagne et plusieurs tentatives échouent. Le 4 juin,
Felix Norton se rend à 8 572 mètres sans
appareil à oxygène.
Le
8 juin, Mallory et Irvine tentent
le sommet à leur tour avec des appareils à oxygène
modifiés par Andrew Irvine. Les conditions météorologiques
se gâtent. Pendant un court instant, Noel Odell aperçoit
vers 12h50 les grimpeurs à travers une percée dans
le brouillard sur l'arête nord-est. Selon Odell, ils avaient
pris du retard mais semblaient résolus à la tâche.
On n'a plus revu Mallory ni Irvine. On les chercha pendant plusieurs
jours sans trouver aucune trace d'eux.
Noel
Odell affirma plus tard avoir vu ses coéquipiers à peu
près à la hauteur du Second
Step.
Après qu'on lui eut fait remarquer qu'il était presqu'impossible
de voir le Second Step de l'endroit où il se tenait à l'époque,
Odell hésita entre le First Step et le Second
Step.
Aujourd'hui,
de nombreux alpinistes et historiens de l'Everest se demandent où se
trouvaient précisément George L. Mallory et Andrew « Sandy » Irvine
lorsqu'ils furent aperçus pour la dernière fois par
Noel Odell. Auraient-ils pu atteindre le sommet avant de périr
sur la montagne ?
Les tentatives des années 1930
En
1933, une autre expédition britannique, conduite par Hugh
Ruttledge, prend la route de l'Everest.
Elle est principalement composée de Jack Longland, Franck
Smythe, Eric Shipton, P. Wyn Harris et L.R. Wager. Le 30 mai, une
tentative sans oxygène s'avère infructueuse. Mais le
piolet de Andrew Irvine est retrouvé. Le 1er juin, Eric Shipton
et Franck Smythe tentent un nouvel assault mais doivent rebrousser
chemin.
En
1934, parti sur la montagne avec quelques Sherpas, Maurice
Wilson établit un camp et
leur demande de l'attendre pendant dix jours, tandis qu'il tentera
le sommet en solitaire. Son corps fut retrouvé en 1935 à 6 400 mètres.
En
1935, la cinquième expédition britannique est conduite
par Eric Shipton et
se compose de Bill Tilman, C.B.M. Warren, E.G.H. Kempson,
L.V. Bryant et E.H.L. Wigram. La mousson est déjà commencée
et les conditions ne sont pas favorables à un assaut. L'équipe
doit retourner à Darjeeling.
De
nouvelles expéditions britanniques pour atteindre le sommet
furent mises sur pied en 1936 avec Ruttledge et en 1938 avec H.W.
Tilmann... mais en vain. Aucun alpiniste n'arrivera à dépasser
le plus haut point atteint sur l'Everest par Edward
Felix Norton en 1924.
Page complémentaire
Mystère sur l'Everest
George Leigh Mallory
George
Mallory, enseignant de profession, était avant tout un grand
idéaliste. Excellent alpiniste, on lui reconnaissait une
grande vivacité et un goût certain pour l'aventure.
Doté d'une personnalité charismatique, il était
par ailleurs un grand distrait. Lors de sa première ascension
sur l'Everest, la mort de sept Sherpas, emportés par une
avalanche, le troubla. Aussi, en 1924, hésita-t-il à joindre
les rangs de la troisième expédition britannique.
Mais comment faire autrement, renoncer à son engagement,
se dissocier de l'équipe et laisser la tâche entreprise
inachevée ? Mallory alla jusqu'au bout de son rêve.
Il disparut sur la montagne le 8 juin 1924 à l'âge
de 38 ans.
En
1923, lors d'une tournée aux États-Unis, Mallory,
harassé par un journaliste qui ne cessait de lui demander
pourquoi il tenait tant à conquérir l'Everest, lui
répondit... « Because it's there ».
Cette réplique passa à l'histoire.
Andrew Irvine
Étudiant à Oxford
et sans expérience de la haute montagne, Andrew Irvine avait
22 ans lorsqu'il se joignit à l'équipe de la troisième
expédition britannique. Plusieurs spécialistes se
sont demandés pourquoi Mallory avait décidé de
faire équipe avec « Sandy » Irvine
pour tenter l'assaut final le 8 juin 1924. Les historiens de l'Everest,
Audrey Salkeld et Liesl Clark ont avancé quelques hypothèses.
Pourquoi Irvine ?
Mallory
n'était pas favorable à l'utilisation de bouteilles à oxygène
dans la pratique de l'alpinisme. Il considérait cette pratique
anti-sportive. Alors que ses coéquipiers étaient
exténués et que l'on allait manquer de temps, sans
doute Mallory en vint-il à considérer que le sommet
ne pourrait être atteint à moins de recourir aux appareils à oxygène.
Cependant, les inhalateurs et les bouteilles à oxygène
n'étaient pas d'une grande fiabilité à l'époque.
Or,
Andrew Irvine était un touche-à-tout. Il excellait
dans la réparation de ce genre d'appareils. Dans ce contexte,
peut-être que Mallory en vint à considérer
Irvine comme un atout. D'ailleurs, après leur disparition,
des coéquipiers trouvèrent dans leur tente, du matériel
indiquant qu'ils avaient bricollé des appareils à oxygène
avant de partir à l'assaut du sommet. C'était peut-être
la raison pour laquelle ils semblaient avoir pris plusieurs heures
de retard lorsqu'ils furent aperçus pour la dernière
fois.
Crédits photo
John Noel Photographic Collection
(en haut)
Salkeld Collection (en bas à droite)